Interview The Players’ Aid – Brandywine, 1777

Q. Yves, bienvenue sur notre blog. Tout d’abord, pouvez-vous nous parler un peu de vous ? Quels sont vos passe-temps ? Quel est votre travail au quotidien ?

A. Merci pour l’accueil ! Je suis Français, passionné d’Histoire avec un grand H… et des petites histoires qui changent le cours des événements. J’aime les wargames, mais aussi les boardgames plus généralistes, et hors du jeu je passe volontiers du temps à travailler le bois en charpenterie.

Aujourd’hui je me lance dans l’édition avec Les 3 Zouaves, pour créer et publier mes propres jeux en toute liberté. J’ai eu la chance de collaborer avec Phalanx (Keep ’em Rolling) et surtout Worthington Games (Gettysburg – A Time for Heroes), dont le soutien et la transparence m’ont donné envie de franchir le pas et de bâtir ma propre aventure éditoriale.

Q. Qu’est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans la conception de jeux ? Qu’avez-vous le plus apprécié dans cette expérience jusqu’ici ?

A. J’ai voulu créer des jeux parce que je cherchais un équilibre entre rigueur historique et accessibilité. Beaucoup de wargames sont soit trop abstraits, soit trop complexes. Moi, ce qui m’intéresse, ce sont ces instants où tout aurait pu basculer différemment – le débarquement de 1944, la campagne de Belgique en 1815… Mettre ces moments entre les mains des joueurs, c’est une manière de leur faire vivre l’Histoire autrement.

Ce que j’apprécie le plus, c’est de partager cette expérience : voir les joueurs s’immerger, se surprendre et redécouvrir l’Histoire à travers le prisme du jeu.

Q. Quelles leçons avez-vous tirées de la conception de wargames ?

A. Que la simplicité est plus difficile à atteindre que la complexité ! La tentation est toujours d’ajouter des détails, mais l’essentiel est de rester concentré sur ce qui compte : l’atmosphère historique et les choix des joueurs. Pour finir, c’est ce qui rend l’expérience à la fois immersive et fluide, sans perdre l’essence de l’Histoire.

Q. De quoi parle votre nouveau jeu à paraître, Brandywine 1777 ?

A. Brandywine 1777 recrée la grande bataille entre l’armée continentale de Washington et les forces britanniques de Howe, durant la Révolution américaine. Le jeu met l’accent sur les manœuvres, le brouillard de guerre et l’incertitude propres à ce conflit colonial, tout en restant accessible et tendu à chaque partie.

Historiquement, Brandywine est la bataille que Washington a perdue… mais qui a contribué à gagner l’indépendance américaine avec l’aide de la France notamment. C’était un affrontement dramatique, plein de retournements, et je voulais transmettre cette tension aux joueurs.

Q. Que signifie et à quoi fait référence le sous-titre A Time for Heroes ?

A. Il reflète l’idée que l’Histoire se joue souvent dans des instants où chefs et soldats doivent se dépasser. À Brandywine comme à Gettysburg, ce sont parfois des hommes ordinaires qui, par leur courage ou leur ténacité, forgent le destin de leur pays. Ce sous-titre rend hommage à ces moments et à ces héros finalement extraordinaires.

Q. Pourquoi avoir choisi ce sujet en particulier ?

A. Brandywine est une bataille fascinante : vaste par son ampleur, décisive par ses conséquences, mais souvent éclipsée par d’autres épisodes plus célèbres de la Révolution américaine. Elle méritait d’être remise en lumière.

C’est aussi un affrontement où la manœuvre, la ruse et la tromperie ont joué un rôle essentiel – des éléments qui s’accordent parfaitement avec le système que je développe. En somme, c’était un cadre idéal pour raconter une histoire forte qui propose, logiquement, une expérience de jeu tendue et immersive.

Q. Quelles sont les caractéristiques uniques du système utilisé dans ce jeu ?

A. Le système repose sur un équilibre simple mais riche : des activations majeures et mineures pour rythmer le tour, des cubes de momentum qui créent des choix cruciaux, et un usage fort des cartes qui amènent brouillard de guerre et couleur tactique.

La cohésion des formations est suivie directement sur le plateau de manière très visuelle : on voit les armées s’user et se désagréger sous nos yeux, ce qui renforce la tension.

Enfin, la gestion du déplacement des colonnes britanniques est un vrai atout du système : sans recourir au double aveugle, tout est visible par les deux joueurs… mais qu’est-ce qui est vrai, et qu’est-ce qui ne l’est pas vraiment ? Cette incertitude permanente donne à la partie son rythme haletant.

Q. Quel est votre objectif de conception avec ce jeu ?

A. Capturer le ressenti du commandement, naviguer en quelque sorte sur le flot des événements – l’incertitude, les opportunités, le risque. Le joueur doit sentir le poids des décisions, sans être noyé sous les détails et il espère que ses ordres seront exécutés correctement (plus ou moins).

Q. Quels autres jeux vous ont inspiré ?

A. J’attendais cette question avec impatience ! Elle me donne l’opportunitĂ© de remercier Maurice Suckling pour son Chancellorsville. Ma première inspiration pour le moteur ludique. Bien sĂ»r, de nombreux classiques sur la guerre de SĂ©cession en particulier le Gettysburg 125ème anniversaire d’Avalon Hill et les guerres napolĂ©oniennes traitĂ©es notamment par Shakos avec sa sĂ©rie 1806, 1807 et 1815 m’ont influencĂ©, mais j’ai cherchĂ© Ă  en distiller l’esprit plutĂ´t qu’à copier leurs mĂ©canismes. Je me suis aussi inspirĂ© de jeux moins historiques Ă  base de cartes, qui apportent un cotĂ© accessible dynamique, typique des boardgames…

Q. Que peut-on attendre des futurs jeux de la série ?

A. Je vois cela comme une famille grandissante de titres couvrant des batailles emblématiques, toujours avec le même ADN mais adaptés à chaque contexte historique. Le prochain sera situé à l’époque napoléonienne et Sécession US, avec de la cavalerie et de nouvelles dynamiques, mais reconnaissable dans le système. Friedland et Chickamauga pour ne pas les nommer. La finalité est de fournir des règles connues pour lancer les joueurs rapidement dans la bataille !

Q. Quelle est l’échelle du jeu ? Quelle est la structure des unités ?

A. Pour Gettysburg on est à l’échelle de la Division chez les Confédérés et du Corps chez les Nordistes. Pour Brandywine, c’est la Division pour les rebelles et la Brigade pour les troupes de la Couronne. Cela nous permet de jouer avec un nombre réduit de formations sur le terrain, mais avec une connaissance approfondie de chacune d’entre elles. On évite la micro-gestion des unités appartenant à ces grandes formations.

Q. Comment le jeu utilise-t-il les cartes ?

A. Les cartes sont utilisées de 2 manières :

  • Cartes Activation, pour activer les formations prĂ©sentes ou arrivant en renforts avec les colonnes britanniques. Selon le moment de la journĂ©e les joueurs auront plus ou de cartes activation ce qui permet de faire un peu de Deck building. Ces dernières gĂ©nèrent du Momentum qui outre de permettre de relancer des DĂ©s lors d’un combat ratĂ©, permet aussi d’acheter des Cartes Tactiques.
  • Cartes Tactiques, pour la surprise, les sensations et les ascenseurs Ă©motionnels… Les gĂ©nĂ©raux aussi bons soient-ils ne peuvent gĂ©rer tout ce qui se passe au cours d’une bataille. Ces cartes ne font que passer durant le jeu, aux joueurs de s’en saisir s’ils en ont les moyens avant qu’elles ne disparaissent.

Q. Pouvez-vous montrer quelques exemples de ces différents types de cartes ?

Q. Quelle est la différence entre les activations majeures et mineures ?

A. Les activations majeures simulent une préparation préalable plus importante, en terme ludique elle permet à une formation de se déplacer sur deux emplacements. Les activations mineures simulent des réactions opportunistes et les formations dans ce cas ne se déplacent que d’un seul emplacement. Il faut savoir qu’il n’y a pas de phase de combat proprement dite

Q. Que sont les cartes Tactiques et comment sont-elles utilisées ?

A. Elles représentent la créativité et l’initiative locale des commandants – une contre-attaque soudaine, une défense héroïque, ou encore un avantage de terrain. On les joue pendant les combats pour influencer le résultat ou changer le tempo. A part les cartes tactiques natives possédées par les joueurs dès le début de la partie, elles sont acquises tout au long de la partie à la fin de l’activation des formations d’un joueur. Elles ont un coût compris entre 1 et 7 cubes de Momentum.

Q. Quelles informations sont suivies sur le plateau pour chaque division ?

A. Chaque formation est décrite par l’intermédiaire de 3 données importantes :

  • La cohĂ©sion reprĂ©sente le nombre de soldats qu’elle contient, chaque activation (en gĂ©nĂ©ral) rĂ©duit cette cohĂ©sion. Une fois arrivĂ©e dans la zone orange un test est requis, en cas d’échec la formation perd sa capacitĂ© opĂ©rationnelle et s’effondre. C’est intuitif et immĂ©diatement visible.
  • Le nombre de dĂ©s lancĂ©s reprĂ©sente plutĂ´t les capacitĂ©s de commandement de l’officier en charge et de son QG.
  • Les règles spĂ©ciales, le cas Ă©chĂ©ant, pour certaines formations.

Q. Quel est le rôle des cubes de Momentum ? Comment sont-ils gagnés et utilisés ?

A. Le Momentum reflète le flux et le flot continu de la bataille. On gagne des cubes avec les cartes Activation mais aussi durant un combat. On les utilise dans deux cas ; pour acheter des relances de dés lors d’un combat et pour acheter des cartes tactiques.

Q. Quels chefs sont représentés et quels pouvoirs ont-ils ?

A. Washington, a la possibilité de déclencher une de ses 2 capacités une fois par bataille :

  • Assaut gĂ©nĂ©ral, il peut activer 2 formations adjacentes dont une aura un bonus de +2 dĂ©s pour un Ă©ventuel combat.
  • Retraite organisĂ©e, toutes les formations sĂ©lectionnĂ©es reculent d’un emplacement en direction du QG ou de Philadelphie.

Howe :

  • Assaut gĂ©nĂ©ral, identique que Washington.
  • Tea Time, Toutes les formations contenues dans une colonne gagnent +1 cohĂ©sion et doivent se dĂ©ployer. (C’est ce qui s’est passĂ© durant la bataille historique.)

Q. Que sont les commandants de Wing (ailes) et pourquoi les avoir ajoutés au système ?

A. Pour le commandement des Ailes, il y a des effets personnalisés selon le général choisit, secrètement, par chaque armée. Cela peut aller de la Distraction pour Von Knyphausen à un assaut non préparé par Lord Stirling qui malgré son nom est bien dans l’armée Continentale.

Ce sont des chefs qui gèrent un secteur de la bataille qui organisent plusieurs formations. Ils fluidifient le commandement et donnent une nouvelle couche de planification, sans compliquer le système. Chaque joueur en choisit un secrètement, car chacun d’entre eux possède des capacités spécifiques bien particulières.

Q. Comment fonctionne le combat ?

A. Le combat est le prolongement d’un mouvement d’une formation. Il a lieu immédiatement en cas de contact. La table de combat, très simple, est basée sur l’obtention de double, sauf pour le 3 (qui offre un cube de Momentum pour chaque dé sur cette face) sur des jets de dés. Le nombre de dés lancés dépend de la Formation attaquante est du terrain attaqué, en effet ce nombre peut être réduit de 1 ou augmenté de 2.

Q. Comment la victoire est-elle obtenue ?

A. En remplissant des objectifs historiques : contrôler des positions clés, infliger suffisamment de pertes pour briser la cohésion adverse. Le joueur doit équilibrer l’agressivité et la préservation de ses forces.

Q. Quelle expérience le jeu cherche-t-il à offrir au joueur ?

A. Une expérience tendue, riche en narration, où chaque décision compte. Le joueur doit ressortir avec une impression claire du déroulement de la bataille et du drame du commandement à cette échelle.

Q. Quels autres thèmes envisagez-vous pour vos futurs jeux ?

A. Je travaille sur des titres consacrés aux guerres napoléoniennes, de Sécession et même aux guerres de la Révolution française, pour être honnête l’Antiquité aussi. Chaque contexte apporte un nouveau défi au système qui est facilement adaptable.

24. Quand la campagne commence-t-elle ?

A. La campagne sera lancée sur Gamefound, le 7 octobre.

https://gamefound.com/fr/projects/les-3-zouaves/brandywine-1777-a-time-for-heroes

Q. Sur quels autres jeux travaillez-vous actuellement ?

A. Nous entamons actuellement, les premières réunions pour Austerlitz, Un coup de Tonnerre de Rod Bauer avec Andy Loakes et Ken Demyen au développement.

En parallèle nous travaillons sur L’Envol de L’Aigle de Jason St Just qui consiste Ă  sauver NapolĂ©on de l’Ă®le de St HĂ©lène.

Et Cabinet Noir un jeu de Maurice Suckling qui mélange geopolitique, traîtrise, et espionnage !

D’autres projets sont à diverses étapes d’avancement, tels que Friedland ou 1793, La République terrifiante et terrifiée (un jeu semi-coopératif sur la Révolution française).